Dans ce tout nouveau travail appelé Attraction, Christian Milovanoff se livre à un étrange jeu sur la reproduction de ses propres archives qu’il déconstruit et sur le pur enregistrement photographique qu’il va également défaire et transformer. Car collectionner des images du monde faites par lui ou pas, ne suffit pas. « Le retour d’archives est parfois difficile: au plaisir physique de la trace retrouvée succède le doute mêlé à l’impuissance de ne savoir qu’en faire » écrit Arlette Farge (in A. FArge, Le goût de l'archive, Paris, Le Seuil, 1989, p.89). Pour l’historien comme pour l’artiste, il s’agit de donner du sens à ce matériau brut.
Organiser, trier, indexer, choisir, couper, classer, monter, juxtaposer, opposer, rapprocher, harmoniser, dérouler, façonner, aligner, enchaîner, déployer, permuter, retailler, lier, répéter, télescoper, espacer, formuler, placer, déplacer, replacer, dupliquer, coller, agrandir ou réduire… c’est ainsi qu’Attraction a pu voir le jour et se construire patiemment. Jouer avec les images comme avec un jeu de cartes.
Christian Milovanoff fait sienne la formule de Jean-Luc Godard : « montage, mon beau souci ». Il s’agit pour lui de faire résonner plusieurs images entre elles et de constater ce qui se passe alors. Les associer, les superposer, voir simultanément en transparence le recto et le verso d’une page de journal imprimé et photographier alors la greffe qui s’opère alors (et si rien n’advient, recommencer sous une autre lumière, avec un autre cadrage ou bien abandonner l’opération).
Archiver, monter, reproduire pour organiser des « choses « vues », pour ordonner le chaos du visible à travers des récits où la fiction renvoie au documentaire et inversement le réel à la fiction.
Pierre-Lin Renié
Exposition présentée dans le cadre des Rencontres d'Arles 2012