Manifestation, subtile ou grandiose, du cycle de la vie, spectacle naturel inépuisable, constamment renouvelé et toujours différent, le nuage est un objet de fascination sans fin ; il concentre tous les attributs du merveilleux : l’insaisissable, la métamorphose, et par-dessus tout l’apesanteur ; il est d'emblée le plus efficace des ascenseurs d'imaginaire : celui qui nous permet de nous défaire de la gravité. Phénomène naturel, doté d'une matière paradoxale, combinaison de contraires et d’extrêmes (masse, transparence, opacité, vapeur, inconstance, profusion), le nuage apparaît dans toutes les cultures comme une manifestation hors norme, éternellement branchée sur l'infini : c'est l'objet métaphysique par excellence. Mais il est aussi, dans l'art, la poésie, la philosophie, ou la nimbologie, en vrai comme en rêve, le plus humain des corps célestes... Extraordinairement ambivalent, à la fois charnel et immatériel – comme le langage lui-même s'en fait si bien l'écho (de nimber à cumuler, ou même...obnubiler), le nuage entre ciel et terre se vit comme un messager.